lundi 17 mai 2010

Noctîluque


Avis de mise en circulation !!!

Nom: Noctîluque
Série: Ile Flottante
Signe distinctif: Brille dans le noir...
Lieu d'ancrage: Site de l'association de chantier d'insertion Libre Objet http://www.libreobjet.com

Et pour les curieux noctambules amateurs d'histoires abracadabrantes...

Le Noctîluque est un oniromonde de type rêvozoaire. Comme le désigne cette catégorie, le rêvozoaire est une entité cosmogonique de petite taille mais dont le foisonnement ne cesse d'étonner les spécialistes. Il a la particularité d'émettre une lueur caractéristique, le plus souvent à la tombée du crépuscule. Entité complexe, à la fois organisme autonome et astéroïde, il abrite des villes ou villages souvent surpeuplés de diverses créatures.

Son origine est mal connue, et la polémique à ce sujet ne cesse de faire cliqueter les dentiers des mages les plus érudits. Certains pensent que le Noctîluque est un reliquat d'une entité plus grande, qui, par accident ou par volonté de contradiction, se serait disséminée en une myriade de petits rêvozoaires qui auraient continué de vivre en dépit de leur éclatement. C'est la théorie du « Grand Sfloosch », la plus répandue à ce jour. Pour preuve, les bradicules situés sur le dessous du rêvozoaire, témoignent de l'arrachement à l'entité matricielle originelle.

Le Noctîluque peut prendre des formes variées assez étonnantes. Il est cependant possible de retrouver certaines caractéristiques chez bon nombre de ceux observés à ce jour. Sa composition suscite les hypothèses les plus biscornues. Terra incognita, l'hypothèse actuelle est qu'elle provienne de la face cachée d'une lune lointaine. D'autres supposent qu'ils sont des concrétions de cauchemars digérés et transformés en songes par l'action magique de ses habitants.

Cette entité, connue aussi appelée île flottante, se déplace au gré des courants oniriques grâce à ses bradicules. Son coeur est souvent percé d'oculi, larges fenêtres rondes qui servent, dit-on, de grande salle de bal ou encore d'observatoire.

Le Noctîluque se développe de manière assez anarchique et souvent imprévisible. En effet, après son arrachement originel, il se développe et se déploie de manière autonome. Il se forme et se déforme au fil de la Pelote du Temps, se gonfle et se perce comme du gruyère. Il semble qu'il y ait un lien entre l'évolution de sa population endogène et l'anima de l'île flottante. Organisme symbiotique, chacun d'entre eux est pourvu d'une personnalité singulière. Ses habitants y creusent les architectures, en exploitant les concrétions en élévation, mais aussi d'innombrables réseaux souterrains, niches et autres loges troglodytes.

Certains auront peut-être la chance d'apercevoir ces créatures, noctambuliques pour la plupart, se glisser entre les ruelles. Les Noctîluques sont souvent le lieu de villégiature des sorcières, reconnaissables à leur haut chapeau de feutre pointu, déformé et racorni par les intempéries. Vêtues de noir dans des pardessus informes, elles profitent de la tombée de la nuit pour rendre visite à leurs amies, afin de ricaner autour d'un thé fermenté et d'échanger les derniers potins. D'autres soir, on y croisera des dandys divaguant sous leur haut-de-forme prêt à bailler aux corneilles, des chats noirs aux pelisses hérissées, des hiboux éberlués aux yeux globuleux, des divas égarées et autres lutins en goguette.

Les Noctîluques flottent dans les espaces cosmiques de rêverie. C'est donc là que les observateurs attentifs auront le plus de chance de les apercevoir. De loin, ils sont parfois confondus avec un nid de lucioles, vu leur capacité à émettre leur propre lueur. Solitaires, il est aussi possible de les observer en nuées, un peu à la manière de bancs de méduses, prêtes à happer les esprits vagabonds dans leur sillage. Elle tracent la voie des rêves en larges sillons lumineux, repoussant les ténèbres et leurs monstres terrifiants (ceux qui apprécient tout particulièrement de se cacher dans les armoires et sous les lits des enfants pour leur faire de mauvaises farces). Certains diront que ces îles flottantes ont l'oreille musicale. Le bruissement des draps et le ronronnement des vielles roues de vélo auraient sur elles un effet d'appel, un peu à la manière d'un appeau, sans que l'on ne sache vraiment pourquoi.

[Article extrait du Grimoire encyclopédique des mondes imaginaires, oubliés, méconnus ou évanescents, Tome IX « Typologie déraisonnée des oniromondes et autres manifestations comogoniques fantasmagoriques » aux Editions du Crapaud à Lunettes, auteur, lieu et date d'édition inconnus (ouvrage moisi, parcellaire, annoté); propos recueillis par Alexandra Berge.]